vendredi 28 janvier 2011

Gu Cheng (顾城) 1956-1993




阳光
在天上一闪
又被乌云埋掩

暴雨冲洗着
我灵魂的底片
     


1979年



Photographie


Lumière du soleil
Ciel étincelant
Voilés par un nuage sombre

La pluie intense développe
Le négatif de mon âme


(Année 1979)

vendredi 10 décembre 2010

Lina la Jaguine

(...) Dans la nuit, la pluie recommença, ondée tapageuse et diluvienne. Quand les femmes sortirent pour aller à l'appât, elles furent, au bout de dix mètres, trempées jusqu'à la chair et, lorsque deux ou trois heures plus tard elles revinrent, la violence de l'averse ne s'était point ralentie.

Cette nuit-là marqua le commencement d'une période de gros temps et de pluies continuelles. Le vent soufflait avec violence sur toute la Manche et l' Atlantique et chaque jour apportait la nouvelle d'un sinistre.

" Ca me rappelle le jour du naufrage du "King Edward" en 1900, un vapeur qui faisait le service entre Saint Brieuc et l'Angleterre ", disait parfois Jules Herniot à ses enfants - " On n'y voyait pas à 3 mètres mais, vingt dieux ! on entendit corner le pauv' bateau qui s'était égaré dans la brume, jusque du côté de l'île Agot. Et rien à faire pour aller à son secours ! On n'est pourtant pas rien que des fainéants sur la côte, tonnerre ! Vingt fois les gars de Saint Briac, de Lancieux, du Guildo, et ceux d'ici mirent les canots à la mer. A peine les avirons touchaient l'eau qu'une vague arrivait et foutait la barque cul par-dessus tête avec les bon'hommes dedans. Ah ! tu parles si on enrageait ! Les femmes pleuraient en entendant les sirènes et il y en avait qui se bouchaient les oreilles. Marie Maud'huit était comme folle. Elle nous disait des sottises parce que nous n'allions pas porter de l'aide aux naufragés et elle tapait sur son homme parce qu'il voulait y aller, lui, et qu'elle ne voulait pas qu'il risque sa peau. Ca dura deux heures le chambard de la cloche et de la sirène : au bout de ce temps-là ça s'arrêta. - L'agonie du "King Edward" était finie ! Ah ! bon Dieu de bois !... on n'est pourtant pas des pleurnicheurs à Saint Jacut ! - toutes les femmes s'écrasèrent sur leurs genoux et nous autres on fit comme elles après avoir enlevé nos casquettes !... Et puis, brusquement, devers le soir, le vent tomba, et le lendemain ce fut comme quasiment le calme plat."

Au moment où les femmes partaient pour l'appât, elles rencontrèrent Berton, un douanier qu'est maintenant à Saint Malo. Il était blanc comme un linge :

- "Je viens chercher des hommes, dit-il. Entre les Ebhiens et le Chef de l'Ile j'ai vu des paquets qui flottaient. Il faisait trop sombre pour que j'aie pu distinguer ce que c'est mais je donnerais bien ma parole que c'est des pauv' chrétiens !..."
Ca fit traînée de poudre et moins d'une heure plus tard tout le pays se trouvait à la pointe. - Il fallut attendre un bon moment avant de voir bien clair mais tout de même, peu à peu, le jour se leva, un jour sale, et alors, cré fi d'gauche, Pierre Moulier qui n'avait que dix ans en ce temps-là cria :
-"R'gardez donc devers la droite, là-bas, on dirait une procession !"
Tout le monde regarda. C'était bien comme une procession qui s'avançait : les morts du "King Edward" voulaient mettre le cap sur la terre. Ils avançaient puis reculaient par sauts, avec les lames, mais un courant de fond les poussait sur la côte.
"Nous autres, dans les bateaux, on ramait comme des sauvages pour les rattraper et bientôt on fut comme qui dirait sur eux. Misère de nous ! les pauv' gens (...)

Alek PLUNIAN (1894-1967) (Extrait Chapître IX)

jeudi 9 décembre 2010

Nuit d'été

La tiède nuit d'été nous appelle ce soir ;
Viens au jardin, les fleurs seules pourront nous voir,
Et nous respirerons, suaves, pénétrantes,
Les essences glissant des roses retombantes.

Pour nous, les résédas, vieilles fleurs du passé
Exhaleront l'encens d'un bonheur effacé.
Prends ma main dans ta main comme aux jours de l'enfance
Et puis, marchons dans l'ombre et dans la transparence.

Lorsque l'aube naîtra, les myrtes et les buis
Garderont le secret de nos baisers enfuis.
Vois, là-haut, dans le ciel, la barque d'or s'avance,
Tout se tait au jardin : voluptueux silence !

Existe-t-il ailleurs plus merveilleux séjour ?
Nous allons, dans la nuit, parler de notre amour ;
Ta voix chère sera la plus douce caresse
Pour mon âme fervente où tout n'est que tendresse.

Annaïk LE LEARD (1892-1972)